"On rêve quand on lit une préface à la Bible de ce genre... On est loin du compte aujourd'hui. "
Pierre Guyotat
Dans sa préface, Olivetan s'élevait contre tous les pouvoirs et s'adressait aux persécutés.
Quelques extraits :
La bonne coutume a obtenu de toute ancienneté que ceux qui mettent en avant quelque livre en public le viennent à dédier et présenter à quelque Prince, Roy, Empereur ou Monarque, ou s'il y a majesté plus souveraine... Aucuns ont bien telle prudence et égard que leurs inventions ne seraient pas bien reçues du peuple, si elles ne portaient la livrée de quelque très illustre, très excellent, très haut, très puissant, très magnifique, très redouté, très victorieux, très sacré, béatissime et sanctissime nom.Pourquoi avoir eu le tout bien considéré et vu courir et trotter tous les autres écrivains et translateurs, l'un deçà, l'autre delà, l'un à son Mecénas libéralissime, l'autre à son Patron colendissime, l'autre à son je ne sais quel Révérendissime: je ayant en main cette présente translation de la Bible, n'ay pas tant fait pour icelle dame coutume... que je me sois voulu asservir et assujettir au droit qu'elle exige et requiert...
Olivetan invitait ensuite le lecteur à prendre son indépendance :
Et Olivetan listait ainsi les véritables destinataires de sa traduction :Ne te chaille! (Courage!) Prends congé de tes maîtres et de cette traître marâtre que tu as si longtemps appelée mère.
Viens hardiment avec tous les plus braves et mignons de ta cour tous faits exécration pour Christ, non pour leurs méfaits, desquels les titres sont ceux-ci, asçavoir:
Injuriés, Blamés, Chassés, Decriés, Désavoués, Abandonnés, Excommuniés, Anathématisés, Confisqués, Emprisonnés, Géhennés, Bannis, Eschellés, Mitrés, Décrachés, Chaffaudés, Exoreillés, Tenaillés, Flétris, Tirés, Traînés, Grillés, Rôtis, Lapidés, Brûlés, Noyés, Décapités, Démembrés, et autres semblables titres glorieux et magnifiques du Royaume des Cieux ...
Des Alpes ce XIIe de Février 1535.
Source : "Leçons sur la langue française", de Pierre Guyotat, Editions Léo Scheer